Et si on formait vraiment les stagiaires plutôt que de les exploiter ?

Et si on commençait par les définitions légales d’un ou d’une stagiaire ?

Togo :
Le Code du travail togolais (Loi n° 2021-012) ne contient pas une définition explicite et complète du stagiaire, mais il régule les contrats de travail et met en avant l’importance de la formation et du développement des compétences dans le cadre de l’emploi. Un stagiaire est souvent encadré par une convention de stage qui précise les droits et responsabilités du stagiaire ainsi que de l’employeur dans le cadre de sa mission​.

France :
Selon le Code de l’éducation (article L.612-8), un stagiaire est une personne inscrite dans un établissement d’enseignement poursuivant une formation qui inclut des périodes d’immersion professionnelle. Le stage est encadré par une convention tripartite (étudiant, établissement, organisme d’accueil) et doit offrir des missions pédagogiques et formatrices. Les stages de plus de deux mois obligent une gratification minimale​.

Canada (Fédéral) :
Les Normes du travail fédérales stipulent que les stagiaires sont des personnes qui acquièrent une expérience professionnelle en milieu de travail. Ils ne sont pas considérés comme des employés à moins qu’ils ne reçoivent une compensation. Comme précisé sur le site du Gouvernement du Canada, « un stagiaire est traité de la même manière qu’un employé aux fins de la partie III du Code canadien du travail (Code) ». Une protection spécifique s’applique aux stagiaires et étudiants stagiaires non rémunérés, notamment en termes de sécurité et de conditions de travail​.

Cet article traite des défis pour les stagiaires en Afrique Francophone. Le principal problème en Afrique francophone est le manque de structuration et d’encadrement des stages. Ils sont souvent utilisés comme main-d’œuvre gratuite ou pour exécuter des tâches non qualifiantes. Cela freine le développement des compétences et l’employabilité.

Stagiaires en Afrique Francophone: des talents en devenir, pas des assistants personnels à exploiter.

Dans plusieurs entreprises africaines aujourd’hui, il n’est pas rare de voir des stagiaires assignés à des tâches qui n’ont rien à voir avec leur domaine d’apprentissage : faire des courses au marché, réserver des rendez-vous personnels pour un supérieur, ou encore gérer des mandats purement domestiques.

Certains managers justifient l’envoi de stagiaires faire des courses domestiques en affirmant que cela développerait leurs compétences en gestion de temps et de projet. Comme si ces jeunes n’avaient jamais fait les courses pour eux-mêmes ou leurs parents auparavant ! Faut-il vraiment apprendre cela auprès de leur supérieur pour gagner sa confiance ? Absurde, vous dites ? Moi aussi !

Une telle pratique soulève des questions fondamentales sur la manière dont le stage est perçu et encadré dans nos organisations, particulièrement en Afrique Francophone. Le problème ne réside pas uniquement dans l’exploitation évidente des stagiaires, mais aussi dans l’absence de structures et de processus adaptés pour leur permettre de s’épanouir professionnellement.

Pourquoi ce modèle doit changer ?

Un stage bien structuré n’est pas une faveur accordée à un jeune talent : c’est un investissement. Il s’agit de former un futur collaborateur, voire un futur leader, tout en offrant un cadre où il peut :

  • Acquérir une expérience réelle dans le domaine ciblé.
  • Développer des compétences professionnelles concrètes : gestion de projets, analyse stratégique, maîtrise d’outils spécialisés, etc.
  • S’intégrer dans une équipe et comprendre les dynamiques de collaboration.

Faire des courses ou remplir des tâches éloignées de ces objectifs professionnels empêche ces jeunes talents de s’épanouir et envoie un message désastreux : leur rôle est accessoire, voire insignifiant.

Des pistes de solutions

Pour mettre fin à ces pratiques et valoriser les stages, l’organisation qui recrute un ou une stagiaire peut :

  1. Créer un cahier des charges clair pour chaque stage, définissant les responsabilités, les objectifs et les résultats attendus.
  2. Former les superviseurs à encadrer et accompagner les stagiaires avec bienveillance et professionnalisme.
  3. Établir un processus d’évaluation structuré, où les stagiaires peuvent mesurer leur progression et identifier leurs points d’amélioration.
  4. Sensibiliser à l’importance éthique du stage, en le présentant comme un échange gagnant-gagnant : l’organisation forme un jeune talent, qui, en retour, apporte un regard neuf et des idées nouvelles.

L’impact attendu

Un meilleur encadrement des stages ne bénéficiera pas uniquement aux stagiaires, mais à l’ensemble de l’environnement professionnel :

  • Pour les stagiaires, une expérience positive renforcera leur confiance en eux et leur employabilité.
  • Pour les entreprises, elles gagneront en attractivité auprès des jeunes talents et développeront une réputation d’excellence.
  • Pour la société, cela contribuera à professionnaliser davantage le statut de stagiaire et à faire évoluer les mentalités.

En conclusion

Il est plus courant de trouver des études sur la transférabilité des compétences des Africains vers les pays industrialisés ou sur le lien entre stages et employabilité en Afrique que des analyses approfondies sur la structuration et l’organisation des stages. Pourtant, une meilleure structuration des besoins du marché de l’emploi en Afrique francophone pourrait transformer les stages en véritables tremplins professionnels.

Et si l’on envisageait l’introduction d’un modèle d’alternance combinant apprentissage en entreprise et formation académique comme une alternative prometteuse ? En associant théorie et pratique, ce système offrirait aux stagiaires l’opportunité de devenir des collaborateurs opérationnels, mieux adaptés aux exigences du marché.

Le stage devrait être une opportunité d’apprentissage et de croissance mutuelle, pas une excuse pour déléguer des tâches personnelles ou administratives. Chers managers, souvenez-vous : vous avez été stagiaires un jour. Si vous avez déjà vécu ce scénario, pourquoi le rejouer ? Épargnons aux stagiaires ce remake dont personne ne veut !

Et si nous changions les choses pour une fois ? Repensons nos pratiques et faisons du stage un tremplin vers l’excellence.

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